Nous sommes en décembre 2017.
Depuis 1 an, je traverse une période difficile.
J'ai besoin d'autonomie en dialyse mais divers obstacles se sont mis en travers de ma route.
Les démarches pour le don vivant d'un rein de mon frère ont échouées après de multiples péripéties et la déception a été à la hauteur de l'espoir attendu.
Quelques mois après ce passage difficile à surmonter, je suis hospitalisée pour une suspicion d'embolie pulmonaire car je suis sous anti-coagulants en rapport avec ma fistule, donc potentiellement à risque.
Dans le même temps, mon néphrologue me dit qu'il faut changer de point de ponction pour protéger la fistule. C'est quelque chose qui m'inquiète beaucoup et qui me terrorise.
Je ne me sens pas en état de changer de point de ponction après tout ce que j'ai subi d'incontrôlable récemment Je suis épuisée moralement.
Mon néphrologue lui, insiste lourdement. Il s'inquiète.
Comme il s'inquiète, il stresse.
Notre relation est compliquée depuis quelques mois. Les infirmières temporisent beaucoup.
De mon côté, cela devient tellement compliqué, que je cherche à changer de centre de dialyse, mais les centres dans ma région sont tellement pleins qu'ils n'acceptent pas les nouveaux patients sauf cas d'urgence.
Je réfléchis même à arrêter les dialyses.
Lorsque j'arrive ce mercredi de décembre 2017 en dialyse, je suis très stressée.
Lors de la dernière dialyse, mon médecin m'avait sommé de changer de point de ponction.
J'ai tout de même réussi à lui dire à que ça me stressais énormément et que je n'étais pas prête.
Mais pour lui, ce n'était pas audible : la fistule avant tout.
1 heure après mon branchement, "mon" néphrologue entre dans la pièce de dialyse.
Il est en colère car je n'ai pas changé de point de ponction.
Je lui explique que c'est au dessus de mes forces et je lui demande de me laisser du temps.
Il s'énerve en haussant le ton, exige que je lui donne une date pour ce changement et termine par : "vous n'avez plus 12 ans!".
Je me mets à pleurer à chaude larmes. Il quitte la pièce.
En pleine dialyse, je demande à l'infirmière de me débrancher tellement je me sens mal.
Je suis en pleurs sur mon lit. Me sentant tellement vulnérable, je n'ose même pas sortir de ma chambre de dialyse, incapable de croiser qui que ce soit.
Je téléphone à d'autres centres de dialyse aux alentours, les suppliant de m'accepter chez eux.
Toutes les réponses sont négatives.
Je dis à l'infirmière bien peinée, que je ne veux plus venir en dialyse.
En désespoir de cause, je téléphone à la directrice adjointe de mon centre que je connais bien et qui a toujours bienveillante envers moi.
Elle est absente, je tombe sur une cadre de mon centre qui est adorable.
Elle prend le temps de m'écouter et me promet que la directrice adjointe me téléphonera en début de soirée.
Quelques minutes après, la directrice me téléphone en effet.
Elle est catastrophée que je sois dans cet état et prend le temps de m'écouter et d'entendre ma détresse.
Elle me dit qu'elle va faire son maximum pour m'aider et qu'elle me rappellera le lendemain pour tenter de trouver une solution.
Le lendemain, toujours sous le choc, je téléphone à un représentant d'association de patients qui comprend ma détresse et s'engage à solliciter la direction.
Dans le même temps, je sollicite l'Agence Régionale de Santé de ma région pour expliquer ma détresse face à mon sentiment d'incompréhension.
En fin de matinée, la directrice adjointe me rappelle comme promis, et me dit qu'elle m'a trouvé une place dans une autre unité de mon centre.
Elle ajoute avoir expliqué ma situation à l'équipe qui va me recevoir et la fragilité de mon état.
Je me sens rassurée et ce d'autant plus que j'ai un très bon contact avec la néphrologue de cette unité.
Quelques minutes après le coup de fil de la directrice, la secrétaire du directeur me téléphone dans l'objectif d'organiser une réunion le même jour vers 17h avec la directrice adjointe et le directeur.
Cela me convient.
Enfin soulagée, mais encore sous le choc et très stressée, je me prépare pour ce rendez-vous.
J'arrive en avance.
J'ai les larmes aux yeux. Je me sens encore très fragile.
La directrice et le directeur m'attendent et me font entrer avec sourire et bienveillance.
Le directeur prend la parole et me demande comment je vais.
Il écoute avec intérêt ce que je relate de l'incident de la veille.
Il hoche la tête et me demande...
"Que peut faire l'institution pour que vous subissiez moins ?"
Je lui réponds que c'est exactement cela. Je subis tout. Je subis trop. Que j'ai besoin de répit et d'une modalité de dialyse mieux adaptée.
Je lui indique que j'aimerais faire mes dialyses à mon domicile.
Que c'est un projet qui me permettrait de moins subir, d'être plus libre et autonome.
La directrice adjointe prend la parole et dit qu'elle pense que c'est une bonne idée à mettre en place ensemble et que la direction l'approuve et l'appuiera.
Dans cet objectif, elle en parlera à mon néphrologue référent et m'assure qu'elle suivra le dossier de très près.
Epilogue : je suis en hémodialyse conventionnelle à domicile depuis le mois d'octobre 2018.
Les relations avec mon néphrologue se sont grandement améliorées.
Nous avons désormais des échanges loyaux, équitables et constructifs.
En somme, nous nous faisons maintenant confiance mutuellement.
Je crois qu'il a compris les raisons de mon mal-être.
Cet épisode douloureux a donc pu améliorer notre partenariat thérapeutique.
A ce jour, tout se passe bien.
Crédit photos: Laure de Montalembert, journaliste.
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